La guerre de Vendée (1793-1796)

Connaissez-vous la guerre de Vendée ? Si oui, cet article vous servira à vous remémorer cet épisode important de la Révolution. Si non, il vous permettra de connaître en profondeur ce sujet si intéressant. Pour vous résumer la guerre de Vendée en quelques mots et pour vous mettre dans le bain, la guerre de Vendée, c’est 200 000 morts, des milliers de déplacés et des retournements de situation qui auraient pu TOUT changer à la Révolution. Laissez-moi donc vous transporter dans cette histoire, du début jusqu’à son dénouement.

Qu’est-ce que la Vendée ?

Appelée jusqu’au 4 mars 1790 le Bas-Poitou, la Vendée est un département de l’ouest de la France qui s’étend (aujourd’hui) sur 6.720 km2. Elle comptait près de 130.000 habitants, avec en majorité des paysans pauvres ; une grande majorité était aussi chrétienne et donc indirectement attaché au Roi Louis XVI.

Les raisons du soulèvement

On pourrait penser que les Vendéens avaient une haine envers la Révolution dès son début ; mais c’est faux. La majorité des Vendéens était favorable à celle-ci. L’obtention de nouveaux droits, la fin des privilèges… Les paysans vendéens voyaient cette Révolution comme une libération, car sans aucun doute ils voulaient du changement (comme la majorité des Français de l’époque). Pourtant, la Révolution commence à leur poser problème à partir de 1790. La Constitution civile du clergé du 12 juillet 1790 vient en effet freiner cette bonne perception de la Révolution. Ce qui est écrit dans cette Constitution, par exemple, c’est que les prêtres, s’ils ne prêtent pas serment à la Constitution, sont contraints de s’exiler ; une très grande majorité ne prêtera pas serment, seulement 35 à 50 % le feront dans l’Ouest, contre 80 à 100 % dans le centre de la France ou à Paris, par exemple. Les paysans voient les prêtres auxquels ils sont attachés s’enfuir ou se cacher auprès d’eux : dans l’esprit des paysans chrétiens naît désormais la perception de la Révolution comme anti-chrétienne. Cette obligation d’exil est donc vue comme une remise en question de leur droit de culte.

Ensuite, dans la logique chrétienne, on l’a déjà dit, les paysans sont attachés à leur roi (on rappellera que dans la religion catholique et dans les monarchies européennes, le roi est représentant de Dieu sur terre). Pourtant, en décembre 1792, Louis XVI est condamné à mort par la Convention pour diverses raisons. Il est décapité le 21 janvier 1793 et, par conséquent, les paysans le prennent mal, très mal. Comme si cela ne suffisait pas, leurs salaires sont très bas, et le prix du pain augmente très fortement depuis 1789. Pour dire à quel point la situation est dramatique, le prix du pain noir va grimper jusqu’à « 7 à 8 sols » alors que leurs salaires se comptaient à « près de 9 à 10 sols par jour » (déclare Chambon, député du peuple, le 25 février 1793). Ce qui ne leur permet donc pas de se nourrir décemment.

Et ce n’est pas fini : un autre événement vint les persuader que la révolte est la seule solution : la demande de la République de lever une armée de 300 000 hommes pour aller combattre leurs « ennemis » sur le front de l’Est. C’est fondamentalement cela qui a été la goutte de trop. On imagine bien les paysans se dire : « Pourquoi enverrais-je mon fils se battre contre un ennemi qui vient me sauver des griffes de la République ? »

Vous l’aurez donc compris, ce soulèvement n’est pas un caprice, et est encore moins une décision prise à la légère.

Le conflit commence et prend de l’ampleur

En conséquence, le 10 mars 1793, la « contre-révolte », comme ils l’appellent, éclate, et les premiers combats font rage. Le peuple de Vendée a désormais fait son choix : il se battra pour le retour du roi afin que l’autorité et que leur liberté de culte soient assurées de nouveau. Paysans, anciens militaires, contrebandiers ou encore valets : on parle ici d’une très grande partie des Vendéens qui se soulève. Armés de fourches et dirigés par des hommes du peuple (curés, etc.), les Blancs (les Vendéens) ne font pas de quartiers et remportent des victoires importantes. Pris d’assaut, les gardes nationaux, les curés constitutionnels (c’est-à-dire l’inverse des prêtres réfractaires), ainsi que les bourgeois, seront exécutés, et les domaines des patriotes (les « fervents républicains ») dévastés et pillés. Les jours suivants le 10 mars, et pendant près d’un mois, les contre-révolutionnaires utilisent ces mêmes procédés : les ennemis à la « paix » sont exécutés sommairement.

À Machecoul, à l’extrême sud de la Loire-Atlantique et au nord de la Vendée (qui fait partie de la Vendée militaire, c’est-à-dire la zone de guerre), le procédé fait 545 morts. Mal formés mais bien armés grâce aux différentes captures liées aux victoires des Blancs, il y a de l’espoir.

Plusieurs grands généraux prennent part à la bataille, comme François Athanase de Charrette de La Contrie, ancien marin dans la marine royale ; il devient le principal chef des Vendéens, et il était notamment connu pour sa rigueur et sa persévérance. D’autres, comme Stofflet, ont une place importante dans la révolte du côté vendéen.

La République, elle, se repose sur la capacité de combat des gardes nationaux ; elle improvise et ne prend pas vraiment la révolte au sérieux dans les premiers jours. Elle ne fait lever que quelques temps plus tard une armée de volontaires de 12 000 hommes à Paris (les « héros à 500 livres »), bien ridicule face aux 80 000 combattants vendéens mobilisés dans toute la Vendée militaire. Elle peut pourtant, elle aussi, compter sur ses grands généraux : le général Marcé, par exemple.

Sans surprise donc, la République perd du terrain, et les Blancs obtiennent des victoires très importantes ; la prise des Ponts-de-Cé, le 27 juillet, ira jusqu’à menacer Angers. Cette période est appelée le printemps des victoires.

La convention prend des mesures radicales, début du dénouement du conflit

Même si la Convention ne prend pour l’instant pas vraiment au sérieux la révolte, elle prend des décisions très radicales. Le 1er octobre, elle vote une loi demandant la condamnation à mort des « brigands », c’est-à-dire la mort des révolutionnaires royalistes. Les soldats avaient donc tout pouvoir sur les paysans, et la différence entre Vendéens révolutionnaires et Vendéens innocents était difficile à faire — et rarement faite — par les soldats, qui exécutaient sommairement certains Vendéens « suspects ».

C’est à ce moment que commence un semblant de génocide, ou en tout cas la grande phase des massacres (ce sujet fera l’objet d’un autre article, cette fois-ci un article d’opinion, car le sujet est considéré comme sensible).

Après la prise d’Angers par les Vendéens, leur objectif est Nantes. Les Bleus ne sont pas dupes et voient le danger ; ils arrivent à les stopper et à les disperser.

S’ensuit une période d’enthousiasme et de désespoir : les victoires se comptent par dizaines, mais les défaites font très mal. Un des objectifs les plus importants, qui aurait pu tout changer dans le conflit, était de communiquer avec l’Angleterre.

La Rochejaquelein, un général vendéen, part avec un lourd convoi pour la Normandie et espère communiquer avec l’Angleterre et recevoir des secours importants comme des vivres, des hommes et du matériel. Pourtant, l’entreprise échoue, et les troupes de la République, jusqu’alors à leurs trousses, les rattrapent.

Les 12 et 13 décembre 1793, les hommes, les femmes et les enfants se confondent dans un bain de sang impressionnant, faisant face aux Bleus ou tentant de s’enfuir. Une partie réussit à prendre la fuite, mais elle est vite rattrapée, le 23 décembre, par Westermann, appelé par tous le « bourreau de la Vendée », et le même épisode fut répété.

Cet épisode fut donc un échec et un massacre monumental, et il marque la fin de « l’épopée vendéenne ».

Les massacres des colonnes infernales et la fin du conflit

Décembre 1793 et janvier 1794 indiquent donc la fin de la révolte vendéenne. Quoique… Alors que les derniers généraux sont pratiquement tous tués ou se sont cachés, la République doit faire un choix : l’apaisement ou la destruction totale de la Vendée et des Vendéens.

Turreau, général et chef de l’armée de l’Ouest, écarte Kléber et Marceau, deux généraux alors favorables à la réconciliation. Il fait valoir son sentiment de nécessité de faire « disparaître de la carte le territoire maudit de la Vendée », dit-il.

Il va donc envoyer 12 colonnes militaires — les « colonnes infernales » — pour incendier, tuer et détruire sans raison précise plusieurs centaines de villages et de personnes. Cette décision, vous en conviendrez, n’était pas la meilleure, mais eut le don d’être efficace : dans ce malheur, le conflit était obligé de s’apaiser, tant il ne restait plus grand monde pour pouvoir résister…

Le conflit commence réellement à s’apaiser vers la fin de l’année 1794 et le début de 1795. Le traité de La Jaunaye, notamment, signé le 17 février 1795, vint calmer la majorité des Vendéens ; certains résistent encore, avec Stofflet.

Surtout, le changement de chefs à la tête des armées de l’Ouest vint encore apaiser les choses : les généraux qui se succèdent adoptent des politiques de réconciliation. Un des généraux se démarquera réellement : c’est le cas du général Hoche, appelé le « pacificateur de l’Ouest » pour ses bienfaits, mais surtout pour son réalisme.

Les principaux chefs vendéens restants sont traqués puis exécutés. La révolte continue sous forme de guérilla, mais les combattants vendéens restants finissent par déposer les armes. Charrette, qui se sera battu jusqu’au bout, sera fusillé à Nantes en avril 1796.

L’après guerre

Après ce conflit meurtrier, la Vendée est dépeuplée et il faut la repeupler. Elle est aussi traumatisée par cette épreuve, et il faut la réintégrer. Les différents gouvernements qui se succéderont au fil des années (de Napoléon Ier à la Ve République) entreprennent plusieurs politiques de natalité, qui ont plus ou moins bien fonctionné.

À travers les époques, les Vendéens ont pratiquement toujours été fidèles à la monarchie, tant l’ampleur du traumatisme était grande. Plusieurs travaux sur le sujet existent, comme ceux d’André Siegfried, qui analyse le vote monarchiste dans l’Ouest de la France sous la Troisième République.

Aujourd’hui, la Vendée est repeuplée comme il se doit, et les votes des Vendéens ont changé (plutôt centristes).

Évidemment, il y a tant d’autres choses à dire sur ce conflit passionnant, qui fait parfois froid dans le dos. J’espère, en tout cas, que ce voyage vous aura plu et qu’il vous aura paru clair.

Faisons de l’histoire une priorité !

Références bibliographiques :

  1. Blanc et bleus, dans la Vendée déchirée – Jean clément Martin
  2. La Révolution Française – Albert Mathiez
  3. Pour ou contre la révolution – Antoine de Baecque
  4. La révolution française (n3) – Albert Mathiez
  5. La révolution, l’Église et la France. Le serment de 1791 – Michel Vovelle
  6. Archives du Maine et Loire

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