OPINION – L’inaction tue la planète, et pas doucement…

Trois Conférences des Parties (COP) se sont tenues en 2024 sur la question cruciale de l’environnement. Toutes ont abouti, au grand dam de certains, à des résultats strictement insignifiants et bien en deçà des besoins réels de notre planète. La COP 16 en Colombie sur la biodiversité, la COP 29 à Bakou en Azerbaïdjan sur le changement climatique, et la COP 16 en Arabie Saoudite sur la lutte contre la désertification ont été marquées avant tout par l’absence répétée des dirigeants occidentaux. Ce paradoxe occidental réside dans un désintérêt banalisé couplé à un discours engagé, souvent trompeur.
Cependant, aux Pays-Bas, les militants ont trouvé matière à se réjouir : le tribunal de La Haye a reconnu l’État néerlandais coupable d’un excès d’émissions d’azote. Ce procès historique en matière de lutte pour la biodiversité s’est conclu par une victoire pour Greenpeace, une organisation non gouvernementale œuvrant pour la protection de l’environnement, la biodiversité et la paix.
Le gouvernement néerlandais s’était en effet engagé à réduire les émissions d’azote via un plan visant à protéger 40 % des zones concernées d’ici 2025 et 50 % d’ici 2030. Toutefois, le tribunal, saisi par Greenpeace, a estimé que l’objectif de 2025 était d’ores et déjà irréalisable et a ordonné à l’État de tout mettre en œuvre pour respecter celui de 2030, sous peine d’une amende de dix millions d’euros.
Les Pays-Bas disposent désormais jusqu’à 2030 pour réduire leurs émissions d’azote. Il est important de noter que la pollution azotée représente le troisième facteur de perte de biodiversité d’origine humaine, après la destruction des habitats et les émissions de gaz à effet de serre. Elle peut dégrader les sols et fertiliser involontairement les arbres, les prairies et les espèces les plus résistantes, au détriment de la biodiversité.
Le tribunal a notamment dénoncé la politique de la coalition actuelle, dirigée par l’extrême droite, qui a mis fin aux mesures adoptées par le précédent gouvernement pour limiter les émissions d’azote. Il a également critiqué la réduction du budget alloué à cette cause, passé de 24 à 5 milliards d’euros, qualifiant cela de véritable recul. Ces plans visaient notamment à inciter financièrement les éleveurs à cesser leur activité dans les zones sensibles.
Ce procès devrait encourager les Pays-Bas, ainsi que leurs voisins européens, à s’impliquer davantage dans la cause environnementale, à commencer par le respect des lois et des réglementations européennes. Il est essentiel de rappeler que cet engagement ne peut se limiter à la seule promotion des véhicules électriques, eux-mêmes très polluants. Les scientifiques adoptent d’ailleurs des discours de plus en plus alarmants à ce sujet.

Il y quelque chose de profondément humain de ne pas pouvoir imaginer l’effondrement, de meme que l’homme est incapable d’imaginer sa mort. Pourtant, la catastrophe climatique est une réalité. Une prise de conscience s’opère depuis plusieurs décennies, mais le mouvement écologique semble aujourd’hui à un point bas historique, perçu comme “démodé” et sans réel intérêt pour une part considérable de la population, y compris la classe politique.
À deux semaines des élections législatives allemandes, lors du débat télévisé du 9 février entre Friedrich Merz et Olaf Scholz, chancelier sortant, aucune mention n’a été faite des enjeux environnementaux et climatiques. Dans le paysage politique actuel, aussi bien les élus que les électeurs semblent se détourner des luttes qui ont jadis animé la société, telles que le féminisme, l’égalité ou encore l’écologie. Désormais, les préoccupations majeures concernent l’immigration — un sujet largement amplifié par les médias plutôt qu’une véritable urgence — et les questions économiques. En témoigne le sommet sur l’intelligence artificielle (IA) organisé par le président de la République, Emmanuel Macron, du 6 au 10 février. La course effrénée à cette nouvelle technologie, présentée comme une priorité stratégique et économique, entre pourtant en contradiction totale avec l’image écologique que l’Union européenne tente désespérément de se donner. L’IA est en effet une industrie extrêmement énergivore et gourmande en eau, ce qui en fait un double fléau environnemental.
Par ailleurs, la politique géopolitique de l’UE nuit également à l’environnement. Dans un souci de sanctionner la Russie et sous la pression de la nouvelle administration Trump, les Européens achètent du gaz liquéfié américain transporté par navire depuis l’Atlantique, plutôt que d’utiliser les gazoducs qui leur permettraient de s’approvisionner à moindre coût économique et écologique. Tout cela pour finalement acheter du gaz et du pétrole russe sur le marché noir via des navires fantômes…
Ainsi, espérons que ce procès permette de remettre la question environnementale au premier plan et de réveiller les consciences. Dans un contexte où le climato-scepticisme gagne du terrain à l’international, il est essentiel de se rappeler qu’il n’existe pas de planète B. La victoire de Greenpeace pourrait également encourager d’autres ONG à engager des actions en justice pour défendre l’environnement. Si, pour Sylvain Tesson, il nécessitera un despote éclairé pour conduire les populations dans des modes de vie plus sains pour l’environnement, nous ne pouvons qu’espérer que cela puisse arriver un jour sans carcan à la liberté des individus.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Retour en haut