Marta Schaub en Colombie : “Les femmes sont forgées à être fortes”

« Les femmes colombiennes sont des femmes démunies vivants dans des conditions déplorables, mais ce sont des femmes qui se lèvent pour pouvoir se battre pour leurs droits »

Marta Rawska SCHAUB, professeure d’anglais au lycée Franco-Allemand de BUC, nous détaille son voyage bouleversant en Colombie. Avec l’objectif de créer un portrait des femmes dans un pays où le machisme est omniprésent et où les Forces armées révolutionnaires de Colombies (FARC) contrôlent le pays, elle nous livre les histoires poignantes de femmes tout en donnant son avis réaliste sur leurs conditions dans ce pays… La Colombie est un pays situé dans l’extrême nord du continent sud-américain, entre le Venezuela, le Pérou et l’Équateur. Depuis 2016, le pays n’est plus contrôlé officiellement par le FARC mais par son président, Gustavo Petro, qui présente un pays en constante évolution se présentant comme la 3e économie d’Amérique du Sud en termes de BIP. Marta Schaub présente au Lycéen le portrait de quatre femmes, dont les prénoms ont été modifiés par souci de confidentialité.

Marie Rencontrée à l’aéroport, Marie se considère comme chanceuse dans son parcours éducatif. En effet, c’est une étudiante avec de grandes qualités intellectuelles qui, malgré le fait qu’elle soit la seule femme de son université, est parvenue à être diplômée en ingénierie alors qu’elle ne venait pas d’un milieu privilégié. Son père lui aurait dit « Bosse à l’école ! » et, avec beaucoup de détermination, elle a pu réaliser son rêve. Elle explique qu’en Colombie il y a trois « parcours de vie » possibles pour une femme en fonction de ses qualités physiques, psychologiques et intellectuelles:

  • les femmes ayant des qualités intellectuelles comme elle et qui ont accès à l’éducation
  • les femmes avec des atouts physiques pour les hommes et qui se vendent dans la rue, Marta Schaub précise que certains « touristes du sexe » sont très présents en pleine ville et ont des comportements abusifs dont elle a été témoin.
  • les femmes dites « bien mariées » qui s’occupent de leur foyer avec un mari riche qui subvient à tous leurs besoins. De son expérience, M. Schaub nous les portraitise comme des femmes « inaccessibles » avec une allure fière qui reconnaissent qu’elles sont élevées socialement.

Sofia Rencontrée à Santa Marta, Sofia est une jeune femme qui n’a pas pu obtenir son bac et qui travaille en tant que guide de la ville. Elle rêve de devenir hôtesse de l’air, mais la formation coûte trop chère, l’équivalent de 2000€ en France. En Colombie, les aides de l’Etat sont maigres et les revenus moyens colombiens se trouvent bien en dessous de la moyenne de l’OCDE (l’Organisation de coopération et du développement économique) « En Europe ce n’est rien, même si vous n’avez pas assez d’argents, on vous aide » nous explique Marta SCHAUB. Détaillant son histoire, elle raconte qu’un jour, elle se fait arrêter par un homme qui lui impose une féllation. Elle avait 11 ans. Ce n’est que 7 ans plus tard qu’elle l’avouera à sa mère qui, sans réaction, lui diras de «ne pas le dire son père », sachant que la réaction de celui-ci serait de la punir pour « s’être prostituée ». Marta Schaub justifie avec émotion que dans ce pays, les agressions sexuelles ou les viols sont devenus aussi tabous que fréquents, aussi bien dans la sphère familiale que collective.

Angélica Rencontrée dans un village nommé Minka, Angélica est une femme très énergique qui vit de son auberge et de ses plantations de cannabis. Son rêve : rester en Colombie afin de s’élever financièrement dans la pratique du tourisme. Elle raconte cependant les dangers de ce pays, comme le kidnapping qui arrive fréquemment. « Lorsque cela se produit, ils ne préviennent pas la police car s’ils se permettent de kidnapper les gens c’est qu’ils ont des contacts dans la police. C’est un pays corrompu. » Nuançant ses propos, M. Schaub explique que l’argent « règle tout ». Angélica explique que, lorsqu’elle avait 7 ans, elle a subi un viol de la part de son grand-père. Non consciente de ce qu’elle avait subit à cet âge là, elle va voir sa tante et sa grand mère et leurs dit « grand-père a fait pipi en moi ». Celles-ci, après l’avoir lavée et bien habillée, l’emmènent manger une glace, dans une sorte de tentative de lui faire oublier ce qu’elle a enduré.

Tout le long de son voyage, Marta rencontre de nombreuses femmes avec des portraits répétitifs, ayant souvent subit un viol ou des abus sexuels entre leurs 7 et 11 ans. Au sein d’une auberge de jeunesse, elle rencontre le propriétaire, un espagnol installé en Colombie. Il lui avoue que le président Gustave Pedro n’est pas apprécié et que, de tout les pays d’Amérique du Sud, la Colombie est le seul à ne pas avoir signé la convention de l’enfance et des femmes. Marta admet un avis extérieur négatif sur la société colombienne, qu’elle classe de « primitive », avec une éducation peu propagée. « Dans les rues il n’y a pas une seule personne avec un journal, il y a des dames qui dorment sur des matelas par terre » Dans ce village, il y a une histoire connue d’un père de famille drogué de cocaïne qui aurait violé son fils de 2 ans sans qu’il n’y ait de poursuite judiciaire.

Oliva Oliva est une entrepreneuse qui a créé son propre café. Son rêve : pouvoir être reconnue pour ce qu’elle a. Sa fille, Mirandela, 6 ans, veut, elle, être une sirène. Oliva explique qu’elle est une mère protectrice et qu’elle ne confiera jamais sa fille à qui que ce soit, même aux membres de sa famille, « tu ne sais jamais ce qu’il peut se passer ».

Le Lycéen : Que retenez vous de ce voyage ? La Colombie reste t-elle un beau voyage ? Marta Schaub : Ça reste un voyage marquant. Chaque pays me donne une autre vision du monde qui est bouleversant de réalité. J’ai ressenti une grande colère contre la population qui ne protège pas ces enfants. La vie d’une jeune fille innocente peut être bousillée du jour au lendemain par un animal. Nous sommes tous responsables sur le fait d’éduquer nos hommes afin qu’ils puissent porter un regard respectueux sur les femmes. La Colombie reste un très beau pays où les paysages sont magnifiques, mais où la société est endormie et corrompue. Les femmes, en particulier, portent un lourd fardeau et sont “forgées à être forte”.

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